La décentralisation se définit comme un processus qui consiste, dans le cadre d’un Etat unitaire, à transférer des compétences administratives de l’État vers des entités locales distinctes de lui.
La décentralisation est désormais consacrée par l’article 1er de la Constitution qui, depuis la révision constitutionnelle de 2003, dispose que “l’organisation [de la République française] est décentralisée“.
“L’acte I” de la décentralisation
La première grande étape est marquée par la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, qui :
- Remplace la tutelle du préfet par un contrôle a posteriori confié au juge administratif,
- Transfère la fonction exécutive départementale et régionale aux présidents de conseil général et régional,
- Transforme les régions en collectivités territoriales (première élection en 1986),
- Crée les Chambres régionales des comptes
Une cinquantaine de lois et de décrets d’application viendront dans les années suivantes préciser les modalités de cette décentralisation, notamment :
- Les lois des 7 janvier et 22 juillet 1983, qui procèdent à de nombreux transferts de compétences concernant les services publics de l’Etat vers les collectivités territoriales.
- La loi du 26 janvier 1984, qui crée la fonction publique territoriale.
“L’acte II” de la décentralisation
L’« acte II », qui s’ouvre avec la nomination de Jean-Pierre Raffarin comme premier ministre en 2002, est marqué par le vote de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, relative à l’organisation décentralisée de la République. Elle vise à permettre de nouvelles possibilités en matière de décentralisation (bloquées notamment par la jurisprudence du Conseil constitutionnel), tout en corrigeant les défauts de la décentralisation d’alors.
- Elle consacre le principe selon lequel l’organisation de la République française « est décentralisée» (article 1er de la Constitution)
- Elle modifie l’article 72 de la Constitution, consacré aux collectivités territoriales et à leur libre administration :
- Inscription du principe de subsidiarité
- Consécration du pouvoir réglementaire des collectivités territoriales
- Reconnaissance de l’expérimentation législative
- Possibilité de donner à une collectivité la qualité de chef de file.
- Elle consacre des dispositifs de démocratie locale à l’article 72-1 de la Constitution (référendum décisionnel local, droit de pétition…).
- Cette révision introduit plusieurs dispositions novatrices relatives aux finances locales à l’article 72-2 de la Constitution, afin de garantir leur autonomie financière.
La révision du 28 mars 2003 est notamment complétée par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui attribue de nouvelles compétences aux collectivités et répartit certaines compétences en fonction du chef-de-filât, mais ne répond pas totalement à l’objectif initial.
Les débats sur la décentralisation depuis 2010 : vers une recentralisation ?
La réforme de décentralisation de 2010
La loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a été précédée de la loi de finances pour 2010 qui supprime la taxe professionnelle pour la remplacer par la contribution économique territoriale.
- Elle avait pour objectif de réaliser des économies et de réduire la mille-feuille territoriale.
- Elle crée un élu commun aux départements et régions, le conseiller territorial (supprimé en 2013).
- Enfin, elle entendait limiter les compétences des départements et des régions en supprimant leur clause générale de compétence.
Malgré le changement de majorité, reste un certain nombre d’innovations apporté par cette loi :
- Elle a facilité l’achèvement et la rationalisation de la carte intercommunale en obligeant chaque commune à adhérer à un EPCI et a créé les métropoles,
- Elle instaure l’élection au suffrage universel direct, à partir de 2014, des conseillers communautaires en même temps que les conseillers municipaux.
Les réformes de décentralisation de 2014-2015
Les lois MAPTAM du 27 janvier 2014 et NOTRe du 7 août 2015 poursuivent le mouvement dit de « recentralisation » initié en 2010, d’où des critiques nombreuses des élus locaux.
- La clause générale de compétence des départements et régions, rétablie par la loi MAPTAM, a été de nouveau supprimée par la loi NOTRe.
- La répartition des compétences entre collectivités a été profondément modifiée par la loi NOTRe. Elle confie de nouvelles compétences aux régions, réaffirme le rôle du département en matière de solidarité et renforce les intercommunalités désormais organisées autour des bassins de vie.
- La carte régionale a été redessinée par la loi du 16 janvier 2015 (de 22 à 13 régions en métropole).
- Le régime de la commune nouvelle a été amélioré par la loi du 16 mars 2015 et par celle du 8 novembre 2016.
L’exercice des mandats électifs et des responsabilités politiques a par ailleurs été redéfini par plusieurs lois depuis 2015, notamment la loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l’exercice des mandats par les élus locaux.
Les réformes de décentralisation de 2019-2020
La loi du 27 décembre 2019, dite “engagement et proximité”, est une loi de circonstance votée pour répondre aux critiques des maires : elle revalorise leur statut, leur accorde des facilités d’administration et les représente mieux dans les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).
Un projet de loi “Décentralisation, différenciation et déconcentration”, dit “3D” pour autoriser le législateur à adopter des normes différentes selon les parties du territoire. Ainsi, sur leur demande, les collectivités pourraient obtenir du législateur une légalité à la carte.